Anne Hidalgo choquée par les propos d'une élue communiste

En direct du Conseil de Paris


La Maire de Paris s'enflamme 15 minutes après le début de la séance à l'issue de l'intervention d'une élue du Groupe Communiste Front de gauche du 20e arrondissement sur l'action internationale de la Ville de Paris.


27 Mai 2015 13:00

La Maire de Paris peut-elle avoir son caractère ?

Anne Hidalgo : "(...) Salir ce que nous faisons au nom de Paris, je ne peux pas l'accepter et je vous le dis aussi clairement que cela (applaudissements des élus du groupe socialiste). C'est scandaleux... c'est scandaleux... c'est scandaleux. Et je dis ce que je pense, que ça vous plaise ou non".

Pour Nicolas Bonnet, président du groupe Communiste Front de Gauche au conseil de Paris, Anne Hidalgo a "interprété de façon vive (les) propos (de Raphaëlle Primet) mais je peux vous dire que je ne l'entends pas comme ça". Il demande une suspension de séance. La Maire de Paris la lui accorde : "C'est de droit. 2 minutes mais je ne retire rien de ce que j'ai dit".

Que s'est-il dit exactement ? Extraits des débats avec podcast audio en intégralité.

Intervention de Raphaëlle Primet

"Pour nous, dans votre communication (relative à l'action internationale de la Ville de Paris, NDLR) il manque un fil directeur fort. Cette vision est celle d'un monde de Paix (...) Nous faisons partie de l'Association des maires pour la Paix mais notre action reste insuffisante (...) En ce sens la délégation du Conseil de Paris en Israël et Palestine aurait pu s'inscrire dans ce souci d'oeuvrer pour la Paix (...) Nous n'avons pas eu connaissance du programme en amont et nous ne comprenons pas la rencontre avec l'association des maires des villes qui recouvre des colonies israéliennes qui sont illégales au regard du droit international et avec le maire de la ville occupée de Jérusalem. Nous aurions pu rencontrer les associations et les forces politiques pacifistes israéliennes où les soldats de “Breaking the silence”.

Si nous voulons une Paix juste et durable avec des Etats libres et indépendants vivant en paix côte-à-côte sur les frontières de 67, nous ne pouvons nous contenter d'une vision symétrique d'un statu-quo mettant le signe égal entre occupants et occupés (...) Sachant que la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens était un préalable pour des négociations de paix et qu'une campagne internationale est en cours, nous profitons de ce débat pour vous demander d'élever Marouane Barghouti au titre de Citoyen d'Honneur de Paris comme Creil, ville socialiste, l'a déjà fait.

Nous le disions : Paris doit agir pour le respect des valeurs universelles et les droits de l'homme, la liberté d'expression et de circulation. En 2001, nous avions élevé Mumia Abu Jamal Citoyen d'Honneur parce que nous sommes une ville engagée contre la peine de mort et qu'il est le symbole de cette lutte. (...) Nous alertons nos collègues par un voeu : Mumia est en danger de mort (...) Nous vous demandons, Madame la Maire, de bien vouloir interpeller les autorités compétentes pour que Mumia soit traité humainement et dignement (...)"

Réponse d'Anne Hidalgo

"Madame, vous donnez beaucoup de leçons, vraiment beaucoup de leçons. Mais il y a des propos que je peux pas accepter. Ce que vous dites sur le travail que nous faisons avec les villes israéliennes et palestiennes n'est pas acceptable, n'est pas acceptable (...) Quand j'entends vos propos, heureusement qu'on n'est pas l'ONU ici, parce qu'à mon avis, ce ne serait pas une oeuvre de paix qui serait faite dans le monde. Je suis choquée par ce que vous avez dit. Je suis vraiment choquée parce que vous avez une approche unilatérale des sujets. Vous avez une approche unilatérale là où nous avons essayé de travailler avec les populations, avec les maires des villes pour apporter une solution à ces populations. 

Et quand on travaille avec Bethléem avec Jéricho ou avec Ramallah, on fait du travail. Et ce que nous disent les maires Palestiniens que nous avons rencontré c'est "heureusement que vous vous parlez avec tout le monde. Heureusement que vous êtes un pont avec les maires israéliens". Et quand on rencontre les maires israéliens, qu'est ce qu'on leur dit ? Qu'ils doivent nous faire confiance parce que nous, nous parlons avec tout le monde. Et que nous savons que la seule issue c'est qu'ils puissent eux-mêmes se parler et trouver des solutions autour de deux Etats.

Voilà. C'est ça le travail que nous faisons. Et vous venez ici avec des préoccupations, avec une approche politicienne, une approche caricaturale, salir ce que nous faisons au nom de Paris. Je ne peux pas l'accepter et je vous le dis aussi clairement que cela (applaudissements des élus socialistes). C'est scandaleux... c'est scandaleux... c'est scandaleux. Et je dis ce que je pense, que ça vous plaise ou non".

Réaction de Nicolas Bonnet, président du groupe PC-FG

Anne Hidalgo : "Monsieur Bonnet, vous avez la parole".

Nicolas Bonnet : "Madame la Maire, avec tout le respect que je vous dois, nous devons aussi nous respecter dans nos propos, que l'on soit maire ou élu sur ces rangs. Et je trouve que vous êtes allée un peu loin en disant à ma collègue qu'elle salit les bancs de l'opposition dans ses propos. Alors, peut-être que vous avez interprété de façon vive ses propos, mais je peux vous dire que je ne l'entends pas comme ça. Je vous demande une interruption de séance. Je vous remercie".

Anne Hidalgo : "C'est de droit, deux minutes. Mais je ne retire rien de ce que j'ai dit". 
 

Action internationale de la Ville de Paris - Anne Hidalgo s'emporte contre une élue du groupe PC-FG au Conseil de Paris.mp3  (7.62 Mo)


Autres réactions

Buon-Huong Tan, élu du groupe Radicaux de gauche Centre et Indépendants dans le 13e arrondissement :
"Après ces échanges un peu vifs, on va revenir à un petit peu de calme".

Jean-Didier Berthault, élu UMP du 17e arrondissement : 
"Je dirai un mot sur le voeu de Raphaëlle Primet de proposer d'élever Marwan Barghouti au rang de citoyen d'honneur. Madame la Maire, j'avais prévu une autre intervention mais le débat vous venez d'avoir avec notre collègue est assez significatif. Ne feignez pas de découvrir les convictions de vos alliés politiques. Madame Primet, comme les alliés communistes avec lesquels vous gouvernez, ont toujours eu sur la Palestine les mêmes convictions (...) Vous êtes gênée sur ce sujet, vous ne prenez pas position et vous gérez avec des alliés qui eux, effectivement, défendent certaines convictions (...) Alors, sur ce sujet de citoyen d'honneur de Marwan Barghouti, oui, nous sommes effectivement contre, car on n'élève pas au rang de citoyen d'honneur un homme qui a été condamné dans un Etat ami et démocratique, Madame la Maire"

Danielle Simonnet, élue Non-Inscrite du 20e arrondissement : 
"(Rapahaëlle Primet) ne critiquait pas les partenariats entre la Palestine et Israël, ni le combat pour la Paix qui exige la reconnaissance de deux Etats. Mais oui, elle contestait votre rencontre avec certains maires directement impliqués dans la colonisation".

Portrait de Marouane Barghouti peint sur ​​le mur de séparation Israélien à Kalandia le point de passage entre Jérusalem et Ramallah © Ben Siesta sous licence commons creatives
Le conseil de Paris vote à la majorité contre le voeu n° 7 des élus communistes relatif à l’élévation de Marwan Barghouthi à Citoyen d’Honneur de la ville de Paris.
En revanche, les élus parisiens votent à la majorité le voeu n°6 relatif à la situation de Mumia Abu-Jamal.

En vertu d'une "jurisprudence de l'Hôtel de Ville", Patrick Klugman adjoint à la Maire de Paris "chargé de toutes les questions relatives aux relations internationales et à la francophonie", explique que lorsque quelqu'un est menacé de mort, et sans porter de jugement sur Marwan Barghouti qui n'entre pas dans cette jurisprudence, il peut être élevé au rang de Citoyen d'Honneur.

Sur le cas de Mumia Abu-Jamal, "il a été menacé de mort" et de ce fait, "il correspond à nos valeurs" . La Maire de Paris va adresser en ce sens un courrier pour s'enquérir de son état et de sa santé.

Textes des voeux





Journaliste tahitienne. Formations universitaires modestes, en droit, en sciences sociales… En savoir plus sur cet auteur
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